Un auteur a pu dire ceci : « Souscrire à un contrat administratif, c’est accepter un marché de dupe ». Qu’en pensez-vous ?
Définition des termes
Contrat administratif : contrat passé par une personne publique ou pour son compte et soumis à la compétence et au droit administratif soit par disposition expresse de la loi, soit en raison de la présence de clauses exorbitantes du droit commun dans ses stipulations, soit parce qu’il confère à son titulaire une participation directe à l’exécution d’une activité de service public.
Marché de dupe : Entente dans laquelle l’une des parties jouit des privilèges dont la mise en œuvre peut léser la partie adverse.
Comme tout contrat, le contrat administratif repose sur l’accord des volontés. Son exécution suppose l’accomplissement par les cocontractants des obligations souscrites par eux. Cependant, eu égard à l’idée de puissance publique, la jurisprudence dégage des règles particulières aux contrats administratifs, car leur exécution se rattache généralement à une activité de service public. Ces règles se manifestent souvent par des prérogatives ou des clauses exorbitantes de droit commun, et c’est sans doute ce qui fait dire à notre auteur que le contrat administratif réalisé est un marché de dupe. Cette position aurait pu être incontestable si à côté des prérogatives de l’Administration, le contractant ne bénéficiait as d’une sécurité matérielle, à savoir le droit à l’équilibre financier du contrat.
I- L’administration jouit des prérogatives exorbitantes dans l’exécution du contrat administratif
Ces prérogatives concernent la possibilité pour l’administration de prendre des mesures de différents ordres pour contrôler l’exécution et pour en diriger les opérations par des directives ou des ordres de service.
A- Le pouvoir de contrôle et de direction
1- L’administration vérifie si le cocontractant se comporte conformément aux clauses du contrat
Elle peut lui imposer certaines modalités d’exécution non précisées par le contrat.
2- Le pouvoir de modifier unilatérale du contrat
L’administration peut réduire ou augmenter les obligations du cocontractant, imposer des procédés nouveaux d’exécution du contrat. Cf. 10 janvier 1092 Gaz de Deville les-Rouen. Quel que soit le cas, le cocontractant ne doit pas suspendre l’exécution du contrat.
B- Le pouvoir de sanction
C-
Cela arrive :
- Pour cause de méconnaissance des clauses du contrat ou d’inobservation des instructions reçues ;
- Pour malfaçon.
Ces sanctions sont prononcées après mise en demeure. Certaines sanctions sont pécuniaires (pénalité ou amendes), alors que d’autres sont coercitives telle la substitution qui est le fait d’exécuter l’opération par une autre personne (l’administration elle-même ou le tiers) ;
La sanction la plus forte est la résiliation du contrat. La résiliation peut intervenir de deux manières. Elle peut être une résiliation – sanction (généralement elle est prononcée par le juge) ou être une résiliation dans l’intérêt du service. Dans ce dernier cas, le cocontractant n’étant pas en faute, il s’attend à une indemnisation. CE, 2 mai 1958 Distillerie de Magnac – Laval. CS/CA 1er février 1958 TAMEGNI Boniface, AMSECOM AMSECONCOM C/Etat du Cameroun. Cette prérogative redoutable entraîne au profit du cocontractant, un rééquilibrage du contrat.
II- Ces prérogatives sont contrebalancées par des obligations de l’administration, le droit du cocontractant à l’équilibre financier
Etant donné que contrairement au droit privé, il n’existe pas d’exception d’inexécution et que le cocontractant doit s’exécuter à tout prix en droit administratif, le juge administratif permet au cocontractant d’obtenir une compensation financière en cas de rupture de l’équilibre du contrat.
Il n’est pas nécessaire que l’Administration commette une faute. Dans tous les cas, le juge appliquera soit la thèse des sujétions imprévues, soit celle du fait du principe, soit celle de l’imprévision.
A- Le fait du prince (aléa administratif)
On entend par là toute intervention de l’Administration contractante ou d’un organe de la personne publique qui a conclu le contrat et qui modifie les modalités initiales d’exécution de celui-ci.
Il y a compensation intégrale des charges nouvelles.
De manière générale, lorsqu’à l’exécution d’un contrat administratif, des travaux supplémentaires sont nécessaires, à défaut de faire l’objet d’un avenant, ils doivent être effectués par le cocontractant qui aura alors droit à une indemnité compensatrice. La Chambre administrative de la Cour Suprême l’a récemment confirmé dans son jugement n°139/04-05 du 27 juillet 2005, Sté SOTRACOM C/Etat du Cameroun (METPS).
B- La théorie de l’imprévision
Cette théorie a été élaborée par un arrêt du Conseil d’Etat du 30 mars 1916 Compagnie Générale d’Eclairage de Bordeaux. Trois conditions sont généralement exigées pour qu’on parle de l’imprévision.
Il faut qu’il y ait bouleversement du contrat mais, ce que son exécution reste possible ;
- Cet aléa doit être imprévisible :
- Il doit être indépendant de la volonté des parties.
Lorsque l’aléa est définitif, à savoir que l’équilibre financier du contrant ne peut plus être établi, il s’agit d’un cas de force majeure qui met fin à l’exécution du contrat. CE, 9 décembre 1932 Compagnie des Tramways de Cherbourg. En cas d’imprévision, le surcroit causé est partagé entre l’Administration et le cocontractant.
C- Les sujétions imprévues
Cette théorie est proche de l’imprévision, on en parle en cas de difficulté matérielle d’exécution, extérieures à la volonté des parties et prévisibles lors de la conclusion du contrat.
Dans ce cas, l’Administration assure la compensation intégrale des charges imprévues. CE 3 novembre 1982, Société d’Exploitation Louis Gros.
Commentaires
Mes excuses de vous écrire à cette page des commentaires. Je voudrais aussi que vous m'envoyiez des données sur l'exercice, par le gouverneur de province, des compétences déconcentrées et son impact sur la libre administration des provinces.
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