Il n'est pas certain que votre futur directeur de mémoire fasse partie des professeurs que vous connaissez déjà. Les établissements tiennent à votre disposition une liste des enseignants qui sont habilités à diriger des recherches. À l'université, cette liste peut être obtenue dans chaque UFR, à partir du printemps. Elle mentionne la spécialité de chacun des enseignants. Cela peut d'ailleurs vous donner l’envie de travailler sur un sujet auquel vous n’auriez pas pensé.

Trouver la perle rare

Un nom et un domaine de compétence ne suffisent toutefois pas à déterminer si l’enseignant fera un bon directeur de mémoire. « Or, le choix du professeur est déterminant », affirme avec force Daniel, professeur de géographie en deuxième et troisième cycles. « Il faut absolument choisir quelqu’un de compétent, en se renseignant au besoin auprès des anciens élèves ou étudiants. » Pour en savoir plus sur un enseignant, vous pouvez questionner ceux de vos amis qui le connaissent et bien sûr aller assister à quelques-uns de ses cours. Vous aurez ainsi une idée plus précise de ses méthodes et de son style de travail : plutôt novateur ou plutôt classique, dogmatique ou tolérant, autoritaire ou cordial...

 

Le mandarinat

n 1968, les étudiants voulaient sa mort, mais le mandarinat a parfois survécu... De quoi s'agit-il? D’un abus d'autorité intellectuelle : pour schématiser, certains professeurs, spécialistes reconnus dans leur domaine, cherchent à assurer leur descendance en prenant quelques étudiants sous leur aile et en empêchant l’ascension des autres. Le mandarinat est une forme d'élitisme.

Comme le résume Laurent, étudiant en archéologie, il existe ainsi deux catégories extrêmes d’enseignants : les ■■ mandarins ■> se posent comme les détenteurs de la vérité dans leur domaine et verrouillent leur spécialité. Ils ont peu d'étudiants, qu'ils considèrent en fait comme des disciples et qui leur servent parfois de nègres. « Ils vérifient en permanence que l’étu­diant ne représente pas un danger. » Le cas reste toutefois encore rare en master.

Choisir à l'inverse un professeur peu apprécié par ses pairs n’est pas forcé­ment une meilleure solution, prévient cependant Laurent : quand il demandera à rencontrer un spécialiste extérieur, l'étudiant risque d'être accueilli avec condescendance. Il se trouvera alors dans une situation pénible, en porte-à- faux, obligé, soit de désavouer son tuteur, soit de se passer d'informations.

La personnalité du directeur de recherche aura un retentissement pro­fond sur votre travail : sa spécialité, l’orientation de sa réflexion, tout cela peut énormément influencer votre mémoire. Le souvenir de votre directeur vous marquera peut-être même au-delà.

La disponibilité de l’enseignant

Pour l’instant, posez-vous la question centrale : « Ai-je envie d’être très encadré pour mon mémoire ?» et choisissez votre directeur en conséquence. Certains enseignants ont ainsi pour règle de laisser plus de liberté à leurs élèves : ils interviennent peu dans le choix du sujet, voient rarement leurs étudiants, n'exigent pas de comptes rendus au cours de l’année... Cette situation n'est pas nécessairement préjudiciable à l'étu­diant, si celui-ci en est conscient et l’accepte. Seulement, ne surestimez pas vos forces : lorsque vous vous sentirez perdu ou découragé, votre directeur ne sera peut-être pas là pour vous prodiguer son aide. Le type

Choisir un tuteur extérieur tudiante en archéologie, Stéphanie a travaillé avec un directeur de recherche qui n’appartenait pas à son université et n'était même pas enseignant, mais conservateur régional d'un service archéologique. Un cas relativement courant dans sa discipline : pour son mémoire sur l’époque gallo-romaine, une des amies de Stéphanie a même eu un prêtre pour tuteur !

Autre exemple : Ghislain, étudiant en sciences de l'éducation, a choisi un inspecteur général comme directeur de recherche pour son mémoire de M2. « Mon sujet était très ancré dans l’actualité. Il était donc plus intéressant de travailler avec lui plutôt qu'avec un universitaire. »

Il est possible de choisr un directeur de recherche extérieir si, au sein de son université, on ne trouve pas de professeur spécialiste du problème concerné. Il faut alors demander aux autres professeurs membres du jury l'autorisation de prendre telle ou tele personne comme directeur de recherche.

'< Méfiez-vous des guerres d’écoles ! prévient cependant Stéphanie. Il n'est pas certain que votre demande soit acceptée : ne passez pas outre. En impo­sant comme directeur de recherche un spécialiste que n'apprécient guère les autres enseignants, vous êtes à peu près sur d'être mal noté à la fin. »

Sachez enfin qu'un spécialiste peut aussi être inclus dans le jury qui éva­luera votre travail.

d’encadrement n’est pas qu'affaire de principe : il est aussi fonction de la disponibilité de l’enseignant.

« Si l'on a besoin d'être encadré et suivi régulièrement, explique Marianne, mieux vaut ne pas choisir un professeur trop surchargé qui fatalement ne pourra pas s’occuper de tous ses étudiants avec une atten­tion égale. En littérature, ne vous niez pas sur les siècles "faciles” (xix‘ et XX' siècles), qui sont saturés dans le domaine de la recherche. Explorez plutôt les xvr, xvir et xviir siècles, moins visités par les étudiants. »

I. OrUins professeurs, dont la renommée ou la spécialité sont très demandées, dirigent objectivement un trop grand nombre d'étudiants à la fois. Conseils et rende2-vous seront donc rares.

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Les tuteurs en porte-à-faux le tuteur vous aide dans votre recherche, mais c'est aussi lui, avec ses collègues, qui vous notera à la fin de l’année. Si son influence est trop sensible dans votre mémoire, votre directeur se trouvera dans une situation gênante : obligé de se juger lui-même.

Le cas échéant, ne laissez donc pas le tuteur confisquer votre travail. Le directeur de recherche se sent de toute manière partie prenante de vos efforts : votre note lui tient à coeur et il se réjouira, pour vous et pour lui, d’un bon résultat.

Chaque année, certains directeurs de recherche se retrouvent sans étu­diants. Sortez des sentiers battus : peut-être est-ce l'occasion de préférer Fontenelle à Balzac ?

Il est par ailleurs plus facile et plus agréable d’être dirigé par quelqu'un d'ouvert : « Certains enseignants ont un ego surdimensionné et consi­dèrent toute critique et toute divergence comme une attaque person­nelle grave. Il est difficile de travailler avec eux, explique Jean-Marc. Soit on fait un mémoire "orthodoxe" en suivant à la lettre leurs recommandations, soit on passe une année de crise, sans résultat. » Pour beaucoup, l’idéal est donc de choisir un directeur qui connaisse assez bien le domaine concerné, sans être pour autant le spécialiste incontesté de la question ; ainsi y aura-t-il pour lui moins d’implication personnelle.

Les premiers rendez-vous

Que vous ayez ou non en tête un sujet de mémoire précis, il vous faudra très vite demander à un professeur d’être votre directeur de recherche. On l’a vu au chapitre 2, il n’est pas nécessaire d’avoir trouvé son sujet définitif pour contacter l’enseignant. Celui-ci est justement là pour aider l’étudiant à définir un sujet faisable, notamment en lui imposant des limites.

« On rencontre le professeur avec un état d’avancement suffisant du projet », rappelle toutefois Mariane. Pas question de demander un

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rendez-vous à l'enseignant en ayant seulement choisi 1111 domaine géné­ral d’étude. Il la lit que vous ayez en tête au moins un dième et un angle d’approche. Vous pouvez aussi opter pour une liste de sujets, puis les examiner avec l’enseignant. Que vous choisissiez l'une ou l'autre solu­tion, vous devrez avoir débroussaillé le terrain, par la lecture d’ouvrages de base et la recherche de pistes de travail.

11 est préférable que ce premier contact ait lieu avant les vacances d'été : il doit vous permettre de préciser voire sujet. Le professeur vous four­nira généralement une bibliographie succincte, de manière à amor­cer votre recherche. A la rentrée, vous reverrez votre directeur de recherche : votre travail devrait être plus avancé (début de probléma­tique, premiers axes de recherche).

Ne pas se laisser imposer un sujet

« L’année dernière, une étudiante qui avait trop tardé à sélection­ner son sujet s'en est vu imposer un d'office : il 11e correspondait pas du tout à ses centres d’intérêt et elle a eu beaucoup de mal à en venir à bout », raconte Assina, étudiante en anthropologie. Certains enseignants se chargent en effet de fournir un sujet aux étudiants qui n'en auraient pas trouvé un tout seuls. Selon Jean-Marc, étudiant en archéologie, « ça peut être un sujet médiocre, que les profs traînent dans leurs cartons depuis des années et dont personne ne veut : par exemple, l'étude d'un corpus rébarbatif, une synthèse bibliographique ingrate... ». Méfiez-vous donc des « rossignols », ces sujets invendables qui guettent l'élève trop hésitant. « Si le sujet imposé ne vous inspire pas du tout, il faut renoncer », renchérit Mariane. « Toutefois, l'ensei­gnant impose parfois un sujet parce qu'il pense qu’il y a des choses à trouver. Si l’on se sent assez curieux et courageux, 011a intérêt à essayer de creuser la question. »

V    Retrouvez dans le chapitre « Clélia cherche le meilleur thème pour son étude » page 188, le témoignage d’une étudiante sur le choix de son sujet de thèse professionnelle.

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