Qui est le juge administratif au Cameroun ?

Introduction

A travers les vicissitudes qu’il n’est pas possible de suivre ici en détail, il a été admis de bonne heure que les litiges concernant l’administration devaient échapper aux juridictions ordinaires et relever des juridictions spécialisées ou d’autorité administrative à pouvoirs juridictionnels. Le point culminant de cette logique est atteint avec l’affirmation du principe de la séparation des autorités administratives et judiciaires, par la loi des 16 et 24 août 1790, en tant qu’ils interdisaient aux juridictions judiciaires de connaitre des litiges administratifs.

En dépit de l’exécution de principe qu’elles ont formulé, les législations ont été amenées à conférer dans certains cas, compétence aux juridictions judiciaires pour connaitre des litiges en matière administratives. Bien plus, malgré les termes formels des textes proclament le principe de séparation, à certains moments, se manifestent des hésitations à admettre l’incompétence absolue des juridictions judiciaires pour connaitre, sauf attribution légale de compétences. Des litiges intervenant en matière administrative.

Cette situation n’est pas un simple soupçon au Cameroun car si la Constitution fait du juge administratif le principal juge de l’action administrative (I), des textes législatifs sont venus donner au juge judiciaire un véritable domaine de compétence dans le domaine de compétence dans le domaine administratif (II).

  1. I.LA COUR SUPREME (JUGE ADMINISTRATIF), JUGE DE DROIT COMMUN DE L’ADMINISTRATION

L’article 32 de la Constitution pose avant sa révision de 1996 que la Cour Suprême en matière administrative est chargée de statuer souverainement « sur les recours en indemnité ou en excès de pouvoir dirigés contre les administratifs ».

La précision vient de l’ordonnance n°72/6 du 26 août 1972 qui dit à son article 0 que « la Cour Suprême connait l’ensemble du contentieux administratif, à l’encontre de l’Etat, des collectivités publiques et établissements publics. La révision constitutionnelle de 1996 semble plutôt adopter cette dernière formule génératrice. En déterminant ainsi ce qu’est le contentieux administratif, il apparait que la cour suprême est compétente pour connaitre :

  1. A.Du contentieux de la légalité
  2. 1.Annulation
  3. 2.Recours incident en appréciation de légalité
    1. B.Des actions en indemnisation du préjudice u les concessions de service publics et les litiges intéressant le domaine public.

Cette compétence est susceptible d’être étendue par la loi n°9, alinéa 1.

  1. II.L’INTERVENTION DU JUGE JUDICIAIRE DANS LE DOMAINE DE L’ADMINISTRATION

L’incursion du juge judiciaire dans le domaine administratif n’est plus une simple exception. Parfois, le juge judiciaire a un domaine exclusif propre (A), parfois, il partage les compétences avec le juge administratif (B).

  1. A.Les compétences propres du juge judiciaire

Le domaine le plus important est celui de la responsabilité

  1. 1.En matière de responsabilité

Ici, on distingue selon que la responsabilité est faite d’un acte administratif ou pas.

  1. a.En dehors des actes administratifs

Ici, le juge judiciaire est le juge de droit commun de la responsabilité administrative. En claire, toute la matière de la responsabilité extracontractuelle de l’Etat ressortit à la compétence du juge judiciaire (art 9, al.3 de l’ordonnance de 1972) jugement TGI Yaoundé, 6 novembre 1985, NKONDOCK Emile Valentin.

NB : C’est sur la base de cet article que le juge judiciaire connait des litiges aux accidents de circulation causés par les véhicules administratifs et non sur labase de la loi française du 31 décembre 1957, laquelle n’est pas en vigueur au Cameroun.

  1. b.Du fait de l’acte administratif

L’indemnisation en cas d’expropriation pour cause d’utilité publique CS/CA 29 juin 1989 FANKWE John c/Etat du Cameroun.

  1. 2.Autres matières

Les litiges relatifs aux contrats de recrutement des personnels non fonctionnaires de l’administration. GFJ 15 novembre 1966 EKINDI Joël ATANGANA Martin Camille.

  • Les contestations sur les impôts indirects
  • Les litiges concernant l’enregistrement
  1. B.Les compétences que le juge judiciaire partage avec le juge administratif
    1. 1.L’emprise et la voie de fait

Ici, le juge judiciaire ordonne la réparation et la cessation (CFJ 1968 Maw KELLER NGDONGO fait, MEDOU Gaston et ATANGANA NTONGA Sylvestre c/Etat du Cameroun).

  1. 2.L’appréciation de la légalité des actes administratifs

Le juge répressif apprécie la légalité des actes administratifs. Le juge civil ne le peut pas. Ordonnance n°72/6 du 26 août 1972, article 9 (2)).

NB : Aucun texte ne parle de l’interprétation des actes administratifs au Cameroun. Et même la jurisprudence n’a pas encore eu à se prononcer à ce sujet.

Conclusion

L’incursion du juge judiciaire dans le domaine administratif n’est plus une donnée exceptionnelle. Cette incursion compte tenu de son ampleur ne peut plus justifier la clause générale des compétences.

Commentaires   

+5 # Benoît BINAM 26-03-2015 20:57
A mon avis, la législation a considérablement évolué. Nous pouvons à l'heure actuelle nous référer à trois dispositions législatives importantes : tout d'abord, l'article 18 alinéa 1 (b) de la loi n°2006/015 du 29 décembre 2006 portant organisation judiciaire, modifiée par la loi n°2011/027 du 14 décembre 2011 qui consacre la compétence du Président du TGI en matière non administrative. Ensuite, les articles 2, 3 et 14 de la loi n° 2006/022 du 29 décembre 2006 fixant l'organisation et le fonctionnement des Tribunaux administratifs. Le problème le plus important aujourd'hui me semble être la définition claire de "la matière administrative" distinctement de "la matière non administrative" pour la répartition de compétences entre le Juge Administratif et le Président du TGI. En cas de difficulté d'interprétation, le Tribunal Administratif doit se référer à la Chambre Administrative de la CS.
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